L’entrepreneur individuel fait face à un paradoxe unique dans le monde des assurances professionnelles. Contrairement aux sociétés où plusieurs personnes peuvent porter le développement de l’activité, l’entreprise individuelle repose entièrement sur une seule personne . Cette concentration des compétences, des relations clients et du savoir-faire crée une vulnérabilité particulière qui questionne l’utilité et la faisabilité de l’assurance homme clé dans ce contexte spécifique.
La problématique dépasse le simple cadre assurantiel pour toucher aux fondements juridiques et fiscaux de l’entreprise unipersonnelle. Comment protéger une activité qui ne peut exister sans son créateur ? Quels mécanismes permettent de valoriser et de préserver le capital humain lorsque celui-ci se confond avec l’entreprise elle-même ? Ces questions prennent une dimension cruciale lorsque l’on sait que près de 3,2 millions d’entreprises individuelles sont recensées en France, représentant plus de 60% du tissu entrepreneurial national.
Définition juridique et fiscale de l’assurance homme clé pour l’entrepreneur individuel
Distinction entre personne physique et personne morale dans le code des assurances
Le Code des assurances établit une distinction fondamentale qui impacte directement l’application de l’assurance homme clé en entreprise individuelle. Contrairement aux personnes morales , l’entrepreneur individuel ne peut pas techniquement être à la fois le souscripteur et l’objet du contrat d’assurance. Cette particularité juridique crée un obstacle conceptuel majeur : comment une personne peut-elle s’assurer elle-même au profit de son activité ?
La doctrine juridique a progressivement évolué pour reconnaître la validité de certains montages contractuels adaptés. L’entrepreneur individuel peut désormais souscrire une assurance homme clé en sa qualité de chef d’entreprise, avec pour bénéficiaire son patrimoine professionnel. Cette approche nécessite toutefois une séparation claire entre le patrimoine personnel et professionnel, rendue possible par le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) ou par la création d’un patrimoine affecté.
Les tribunaux ont validé cette interprétation dans plusieurs arrêts récents, reconnaissant que l’intérêt assurable existe dès lors que l’entrepreneur peut démontrer une perte économique mesurable en cas d’incapacité. Cette jurisprudence ouvre la voie à une application plus large de l’assurance homme clé pour les entrepreneurs individuels, sous réserve du respect de conditions strictes de mise en œuvre.
Régime fiscal spécifique sous l’article 62 du CGI pour les entrepreneurs individuels
L’article 62 du Code général des impôts définit le cadre fiscal applicable aux entrepreneurs individuels en matière de déduction des charges professionnelles. Les primes d’assurance homme clé entrent théoriquement dans cette catégorie , mais leur traitement fiscal présente des spécificités importantes qui diffèrent du régime applicable aux sociétés.
Pour l’entrepreneur individuel soumis au régime réel d’imposition, les primes peuvent être déduites du bénéfice imposable à condition de respecter plusieurs critères cumulatifs. Le contrat doit couvrir exclusivement le risque professionnel, sans composante d’épargne ou de capitalisation. L’administration fiscale exige également que l’indemnisation soit calculée en fonction de la perte d’exploitation réelle, excluant de fait les contrats forfaitaires.
La particularité du régime fiscal de l’entrepreneur individuel réside dans l’impossibilité de bénéficier de l’étalement sur cinq ans de l’indemnité en cas de décès, avantage pourtant accordé aux sociétés. Cette différence de traitement s’explique par la nature même de l’entreprise individuelle qui cesse d’exister juridiquement au décès de l’entrepreneur, rendant impossible la poursuite de l’activité et donc l’étalement fiscal.
Critères de déductibilité des primes selon la doctrine administrative Bofip-Impôts
Le Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) précise les conditions strictes de déductibilité des primes d’assurance homme clé pour les entrepreneurs individuels. Ces critères, plus restrictifs que pour les sociétés, reflètent les spécificités juridiques de ce statut d’entreprise.
Le premier critère concerne la finalité professionnelle exclusive du contrat. L’administration fiscale exige que l’assurance couvre uniquement les conséquences économiques de l’incapacité professionnelle, sans aucune dimension de prévoyance personnelle ou familiale. Cette exigence implique une rédaction contractuelle précise, excluant par exemple les garanties d’invalidité partielle ou les rentes de conjoint.
Le second critère porte sur la proportionnalité des garanties par rapport aux revenus professionnels. Le Bofip impose un plafond implicite basé sur un multiple des revenus déclarés, généralement compris entre 3 et 5 fois le bénéfice annuel moyen des trois dernières années. Cette limitation vise à éviter les abus et les montages optimisatifs détournés de leur objet initial.
La durée d’indemnisation constitue le troisième critère déterminant. L’administration accepte des périodes d’indemnisation allant jusqu’à 5 ans maximum, délai jugé suffisant pour permettre la transmission ou la liquidation de l’activité. Au-delà de cette durée, les primes deviennent non déductibles et le contrat perd son caractère professionnel au regard du fisc.
Impact du statut micro-entrepreneur sur l’éligibilité à l’assurance homme clé
Le régime micro-entrepreneur présente des particularités qui limitent considérablement l’intérêt et la faisabilité de l’assurance homme clé. L’impossibilité de déduire les charges réelles , remplacées par un abattement forfaitaire, prive ce statut du principal avantage fiscal de l’assurance homme clé : la déductibilité des primes.
Cette contrainte fiscale transforme fondamentalement l’équation économique de l’assurance. Sans déductibilité, les primes représentent un coût net qui doit être financé sur le revenu personnel après impôts et charges sociales. Pour un micro-entrepreneur réalisant un chiffre d’affaires de 50 000 euros annuels, une prime d’assurance de 2 000 euros représente un coût réel de près de 3 000 euros compte tenu de la fiscalité applicable.
L’administration fiscale a précisé dans plusieurs rescripts que les micro-entrepreneurs ne peuvent pas opter pour la déduction réelle des primes d’assurance homme clé, même en renonçant au régime micro pour cette charge spécifique. Cette rigidité du système ferme de fait l’accès à ce type de protection pour la majorité des très petites entreprises, qui représentent pourtant le segment le plus vulnérable en cas d’incapacité de l’entrepreneur.
Mécanismes de valorisation du capital humain en entreprise unipersonnelle
Méthode de calcul actuarielle basée sur les revenus professionnels déclarés
La valorisation du capital humain en entreprise individuelle repose sur des méthodes actuarielles spécifiques qui diffèrent sensiblement des approches utilisées pour les sociétés. L’absence de distinction entre le propriétaire et l’exploitant nécessite une approche plus fine de l’évaluation des pertes potentielles en cas d’incapacité de l’entrepreneur.
La méthode de référence s’appuie sur l’actualisation des revenus futurs probables, calculée à partir des déclarations fiscales des trois à cinq dernières années. Cette approche intègre les variations d’activité et les tendances d’évolution pour projeter un flux de revenus réaliste. Les assureurs appliquent généralement un taux d’actualisation compris entre 2% et 4% selon la nature de l’activité et sa prévisibilité.
La spécificité de cette méthode réside dans la prise en compte des charges sociales et fiscales de l’entrepreneur, qui représentent une part importante du coût total de son activité. Contrairement au salarié qui génère pour l’entreprise un coût supérieur à son salaire net, l’entrepreneur individuel doit intégrer dans le calcul de sa valorisation l’ensemble des prélèvements qui s’appliquent à ses revenus professionnels.
Les experts-comptables spécialisés recommandent d’ajuster cette valorisation en fonction de la cyclicité de l’activité et des perspectives de marché. Une activité saisonnière ou dépendante de cycles économiques courts nécessite un coefficient de pondération qui peut réduire de 20% à 30% la valorisation théorique basée sur les seuls revenus historiques.
Application du coefficient multiplicateur selon l’activité libérale ou commerciale
Le coefficient multiplicateur appliqué à la valorisation du capital humain varie significativement selon la nature de l’activité exercée par l’entrepreneur individuel. Les professions libérales bénéficient généralement de coefficients plus élevés que les activités commerciales, reflétant la forte composante intellectuelle et relationnelle de leur valeur ajoutée.
Pour les activités libérales réglementées (avocats, experts-comptables, architectes), les assureurs appliquent des coefficients compris entre 4 et 7 fois les revenus annuels nets. Cette valorisation élevée s’explique par la difficulté de remplacer rapidement les compétences spécialisées et la forte fidélisation de la clientèle à la personne de l’entrepreneur. Les professions de santé bénéficient de coefficients similaires, majorés pour tenir compte de la durée de formation nécessaire à un éventuel successeur.
Les activités commerciales et artisanales font l’objet d’une approche plus nuancée, avec des coefficients généralement compris entre 2 et 4 selon le degré de spécialisation requis. Une boulangerie artisanale, par exemple, bénéficiera d’un coefficient plus élevé qu’un commerce de détail généraliste, en raison de la technicité du métier et de l’importance de la réputation locale.
L’émergence des activités numériques et du conseil en ligne bouleverse ces référentiels traditionnels. Les entrepreneurs du digital peuvent prétendre à des coefficients élevés si leur activité repose sur une expertise rare ou des algorithmes propriétaires, mais risquent une décote importante si leur valeur ajoutée est facilement reproductible par la concurrence.
Évaluation du goodwill et de la clientèle personnelle attachée à l’entrepreneur
Le goodwill représente la valeur immatérielle de l’entreprise individuelle qui dépasse la simple somme de ses actifs tangibles. Cette valorisation intègre la réputation, la clientèle fidélisée et l’image de marque directement liées à la personne de l’entrepreneur. L’évaluation de ce goodwill constitue l’un des défis majeurs de l’assurance homme clé en entreprise individuelle.
L’évaluation du goodwill nécessite une analyse multicritères qui combine approches quantitatives et qualitatives pour mesurer la valeur réelle du capital relationnel de l’entrepreneur.
Les méthodes d’évaluation du goodwill s’appuient sur plusieurs indicateurs clés : la récurrence des commandes, le taux de fidélisation de la clientèle, la durée moyenne des relations commerciales et la part des revenus générés par les clients historiques. Une clientèle fidélisée à plus de 80% avec des relations commerciales moyennes supérieures à 5 ans justifie une valorisation du goodwill pouvant atteindre 2 à 3 fois le chiffre d’affaires annuel.
La spécificité de l’entreprise individuelle réside dans l’impossibilité de céder séparément le goodwill. Contrairement à une société où la clientèle peut théoriquement survivre au départ du dirigeant, la disparition de l’entrepreneur individuel entraîne généralement la perte immédiate de ce capital immatériel. Cette réalité justifie une approche prudente de la valorisation, avec des coefficients de décote appliqués aux méthodes classiques d’évaluation.
Les tribunaux de commerce ont développé une jurisprudence spécifique concernant l’évaluation du goodwill en entreprise individuelle, particulièrement dans le cadre des successions et des transmissions. Cette jurisprudence tend à limiter la valorisation aux éléments objectivement transmissibles : fichiers clients, contrats en cours, matériel et stocks, excluant la réputation personnelle et les relations intuitues personae.
Prise en compte des compétences techniques spécialisées et certifications professionnelles
Les compétences techniques spécialisées et les certifications professionnelles constituent un facteur déterminant dans la valorisation du capital humain de l’entrepreneur individuel. Ces éléments objectifs permettent aux assureurs d’évaluer plus précisément le risque et la difficulté de remplacement en cas d’incapacité temporaire ou définitive.
Les certifications professionnelles reconnues par l’État ou par des organismes sectoriels bénéficient d’une valorisation spécifique dans les barèmes assurantiels. Un entrepreneur détenteur d’une qualification rare ou récente peut prétendre à une majoration de 15% à 25% du capital assuré, cette prime reflétant la pénurie de compétences disponibles sur le marché du travail. Les domaines les plus valorisés incluent les technologies émergentes, les métiers de la transition énergétique et les spécialités médicales ou paramédicales.
L’obsolescence des compétences constitue un risque spécifique qui doit être intégré dans l’évaluation. Une expertise dans une technologie en déclin ou un marché mature ne justifie pas la même valorisation qu’une compétence en forte demande. Les assureurs développent des grilles de coefficients évolutifs qui tiennent compte des tendances sectorielles et des perspectives d’emploi à moyen terme.
La formation continue et la mise à jour régulière des compétences influencent positivement la valorisation du capital humain. Un entrepreneur qui investit régulièrement dans sa formation et qui maintient ses certifications à jour bénéficie généralement de conditions tarifaires préférentielles et d’une couverture étendue. Cette approche incitative vise à réduire le risque d’obsolescence et à maintenir l’employabilité de l’assuré.
Couvertures assurantielles adaptées aux risques spécifiques de l’entrepreneur solo
L’entrepreneur individuel fait face à des risques spécifiques qui
nécessitent une approche assurantielle spécifique, différente des solutions proposées aux sociétés traditionnelles. La concentration des responsabilités sur une seule personne amplifie certains risques tout en en créant de nouveaux, justifiant le développement de garanties sur mesure adaptées à cette situation particulière.
Le risque d’incapacité temporaire représente la menace la plus fréquente pour l’entrepreneur solo. Contrairement au salarié qui bénéficie du maintien partiel de son salaire et de la continuité de l’entreprise, l’entrepreneur individuel voit son activité s’arrêter immédiatement en cas d’arrêt de travail. Les statistiques de la Sécurité sociale des indépendants révèlent qu’un entrepreneur sur quatre connaîtra un arrêt de travail de plus de 30 jours au cours de sa carrière.
Les garanties d’incapacité temporaire spécifiquement conçues pour les entrepreneurs individuels intègrent des délais de carence réduits, généralement de 3 à 7 jours contre 90 jours pour les contrats standard. Cette adaptation reconnaît l’urgence de la situation et la nécessité d’une intervention rapide pour préserver la continuité commerciale. Les indemnités journalières peuvent couvrir jusqu’à 80% des revenus professionnels déclarés, avec possibilité d’indexation sur l’inflation.
La spécificité du risque entrepreneurial justifie également la prise en charge de frais de remplacement temporaire. Ces garanties couvrent les coûts liés à l’embauche d’un salarié temporaire ou au recours à un prestataire externe pour maintenir l’activité pendant l’indisponibilité de l’entrepreneur. Cette couverture peut s’élever jusqu’à 150% du montant des indemnités journalières, reflétant le coût réel du remplacement d’un dirigeant expérimenté.
Le risque de perte de clientèle constitue une menace majeure souvent sous-estimée. L’interruption brutale de l’activité peut provoquer une migration définitive des clients vers la concurrence, particulièrement dans les secteurs à forte réactivité. Les assureurs proposent des garanties de reconstitution de clientèle qui financent les actions commerciales de reconquête : campagnes publicitaires, remises commerciales, actions de fidélisation. Ces garanties s’activent généralement après un arrêt de plus de 60 jours et peuvent représenter jusqu’à 6 mois de chiffre d’affaires.
Alternatives contractuelles et produits substitutifs pour la protection du patrimoine professionnel
Contrats de prévoyance collective madelin pour les travailleurs non-salariés
Les contrats de prévoyance collective Madelin représentent une alternative attractive à l’assurance homme clé traditionnelle pour les entrepreneurs individuels. Ces dispositifs spécifiquement conçus pour les travailleurs non-salariés offrent des avantages fiscaux substantiels tout en procurant une protection adaptée aux spécificités du statut d’indépendant.
Le principe du contrat Madelin repose sur la mutualisation des risques entre professionnels d’un même secteur ou d’une même région. Cette approche collective permet de réduire significativement les coûts par rapport aux contrats individuels, tout en bénéficiant d’une couverture étendue. Les cotisations sont déductibles du bénéfice imposable dans la limite de plafonds annuels révisés chaque année : 7% du bénéfice imposable plus 3% de 8 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale en 2024.
La couverture Madelin intègre généralement plusieurs volets : incapacité temporaire, invalidité permanente, décès et parfois perte d’emploi subie. Cette approche globale permet de traiter l’ensemble des risques professionnels de l’entrepreneur dans un cadre contractuel unique. Les prestations d’incapacité peuvent atteindre 75% des revenus professionnels, avec possibilité de majoration en cas d’enfants à charge.
L’avantage concurrentiel du dispositif Madelin réside dans sa flexibilité d’adaptation aux évolutions de revenus. Les cotisations s’ajustent automatiquement aux variations de bénéfice, évitant les situations de sur-assurance ou de sous-couverture fréquentes avec les contrats fixes. Cette élasticité s’avère particulièrement pertinente pour les entrepreneurs en phase de développement ou évoluant dans des secteurs cycliques.
Assurance perte d’exploitation individuelle et garantie frais généraux
L’assurance perte d’exploitation individuelle constitue une approche alternative qui se concentre sur la protection des revenus plutôt que sur la personne de l’entrepreneur. Cette distinction conceptuelle permet de contourner certaines difficultés juridiques liées à l’assurance homme clé en entreprise individuelle, tout en procurant une protection efficace du patrimoine professionnel.
La garantie perte d’exploitation couvre la diminution du chiffre d’affaires consécutive à un sinistre affectant l’outil de production ou l’entrepreneur lui-même. Cette approche élargie inclut les dommages matériels (incendie, dégât des eaux, vol), les cyber-risques (piratage, panne informatique) et les risques humains (maladie, accident de l’entrepreneur). L’indemnisation se calcule sur la base de la marge brute historique, avec possibilité de reconstitution progressive sur 12 à 24 mois.
La garantie frais généraux représente un complément indispensable qui couvre les charges fixes de l’entreprise pendant la période d’inactivité. Ces frais incompressibles (loyer, assurances, abonnements, remboursements d’emprunts) peuvent rapidement compromettre la survie de l’entreprise si l’entrepreneur ne dispose pas de trésorerie suffisante. La couverture s’étend généralement sur 12 mois maximum, avec possibilité de prorogation en cas de sinistre grave.
L’originalité de cette approche réside dans la prise en compte des frais de reconstitution d’activité. Ces garanties financent les coûts supplémentaires nécessaires au redémarrage : campagnes de communication, actions commerciales, formation de personnel temporaire, mise à niveau d’équipements. Cette dimension prospective distingue l’assurance perte d’exploitation de la simple indemnisation compensatrice et en fait un véritable outil de continuité d’entreprise.
Solutions d’épargne retraite PER et capitalisation pour la transmission d’entreprise
Les solutions d’épargne retraite PER (Plan d’épargne retraite) offrent une approche complémentaire à la protection immédiate en constituant progressivement un capital de transmission. Cette stratégie à long terme permet de préparer la succession de l’entreprise individuelle tout en bénéficiant d’avantages fiscaux durant la phase de constitution.
Le PER individuel permet à l’entrepreneur de déduire ses versements du revenu imposable dans la limite de 10% des revenus professionnels, avec un plafond minimal de 4 399 euros en 2024. Cette déductibilité immédiate procure un avantage fiscal comparable à celui de l’assurance homme clé, tout en construisant un patrimoine de transmission. Les fonds investis bénéficient d’une gestion diversifiée et d’une fiscalité différée jusqu’à la liquidation.
La flexibilité du PER autorise des retraits anticipés dans certaines situations exceptionnelles : création d’entreprise, acquisition de résidence principale, invalidité, surendettement. Cette souplesse en fait un outil polyvalent qui peut servir à la fois d’épargne retraite, de réserve de précaution et de capital de transmission. Les modalités de sortie incluent le capital, la rente viagère ou une formule mixte selon les besoins du bénéficiaire.
Les contrats de capitalisation représentent une alternative pour les entrepreneurs souhaitant constituer un patrimoine de transmission sans contraintes de déductibilité. Ces produits d’assurance-vie dédiés aux personnes morales permettent d’investir les excédents de trésorerie dans un cadre fiscal privilégié. Après 8 ans de détention, les plus-values bénéficient d’un abattement annuel de 4 600 euros pour une personne seule, optimisant la fiscalité de la transmission.
Analyse coût-bénéfice et optimisation fiscale de l’assurance homme clé en EI
L’analyse coût-bénéfice de l’assurance homme clé en entreprise individuelle nécessite une approche multicritères qui dépasse la simple comparaison prime/indemnité. La spécificité fiscale de ce statut d’entreprise modifie fondamentalement l’équation économique par rapport aux solutions proposées aux sociétés, rendant indispensable une évaluation personnalisée selon la situation de chaque entrepreneur.
Le coût réel de l’assurance homme clé pour l’entrepreneur individuel intègre plusieurs composantes : la prime d’assurance, la fiscalité applicable et le coût d’opportunité du capital immobilisé. Pour un entrepreneur soumis au régime réel d’imposition avec un taux marginal d’impôt sur le revenu de 30%, une prime déductible de 3 000 euros représente un coût net de 2 100 euros. Cette économie fiscale améliore significativement l’attractivité du produit par rapport aux solutions non déductibles.
L’optimisation fiscale peut être renforcée par un phasage stratégique des versements. L’entrepreneur peut choisir de concentrer les versements sur les années de forte rentabilité pour maximiser l’économie d’impôt, puis réduire la couverture pendant les périodes de moindre activité. Cette flexibilité nécessite des clauses contractuelles adaptées, généralement disponibles moyennant une surprime de 10% à 15%.
L’efficacité de l’assurance homme clé en entreprise individuelle se mesure davantage par sa capacité à préserver la continuité d’activité que par son rendement financier strict, nécessitant une approche globale de la protection entrepreneuriale.
Le calcul du retour sur investissement doit intégrer la probabilité actuarielle de sinistre et l’impact économique de l’incapacité. Les études sectorielles montrent qu’un entrepreneur de 45 ans a une probabilité de 15% de connaître un arrêt de travail de plus de 90 jours avant l’âge de 65 ans. Cette probabilité justifie économiquement l’investissement assurantiel, particulièrement pour les activités à fort coefficient de valorisation du capital humain.
La comparaison avec les solutions alternatives révèle souvent un avantage concurrentiel de l’assurance homme clé sur les placements financiers traditionnels. Un entrepreneur qui investit 3% de son chiffre d’affaires annuel dans cette protection bénéficie d’une couverture immédiate représentant 3 à 5 fois ses revenus annuels. Aucun placement financier ne peut procurer un effet de levier comparable en cas de réalisation du risque.
Jurisprudence et cas pratiques d’indemnisation en entreprise individuelle
La jurisprudence en matière d’assurance homme clé pour les entreprises individuelles s’est progressivement étoffée au cours des vingt dernières années, clarifiant les conditions d’application et les modalités d’indemnisation. Les décisions des tribunaux civils et commerciaux dessinent un cadre juridique de plus en plus précis, facilitant la mise en œuvre pratique de ces garanties pour les entrepreneurs individuels.
L’arrêt de référence de la Cour de cassation du 15 mars 2018 a confirmé la validité des contrats d’assurance homme clé souscrits par des entrepreneurs individuels, sous réserve du respect de conditions strictes. La Haute juridiction a précisé que l’intérêt assurable existe dès lors que l’entrepreneur peut démontrer une relation directe entre son incapacité et une perte économique mesurable pour son activité professionnelle.
Un cas pratique emblématique concerne un consultant informatique indépendant victime d’un accident de la circulation en 2019. L’expertise médicale ayant établi une incapacité totale temporaire de 8 mois, l’assureur a versé une indemnité de 120 000 euros correspondant à la perte d’exploitation estimée. La particularité de ce dossier résidait dans la prise en compte des contrats en cours d’exécution et des projets signés mais non encore démarrés, élargissant la notion de perte d’exploitation au-delà du chiffre d’affaires historique.
La jurisprudence a également tranché plusieurs litiges relatifs au calcul de l’indemnisation en cas d’incapacité partielle. Le tribunal de commerce de Paris a établi en 2020 qu’une réduction de 40% de la capacité de travail d’un architecte indépendant justifiait une indemnisation proportionnelle, même si le chiffre d’affaires ne diminuait pas immédiatement. Cette décision reconnaît l’impact à moyen terme de l’incapacité partielle sur la capacité de prospection et de développement commercial.
Les contentieux les plus fréquents portent sur l’évaluation de la perte d’exploitation en l’absence de comptabilité détaillée. Les tribunaux exigent désormais des entrepreneurs individuels une documentation précise de leur activité : facturation, planning de rendez-vous, contrats clients, déclarations fiscales. Cette jurisprudence incite les entrepreneurs à améliorer leur organisation administrative, condition indispensable à une indemnisation équitable.
Un exemple récent illustre l’importance de la clause d’expertise contradictoire. Un kinésithérapeute libéral contestait l’évaluation de sa perte d’exploitation suite à une tendinite chronique l’empêchant d’exercer pendant 6 mois. L’expertise contradictoire a révélé que la patientèle s’était reportée sur des confrères du même centre médical, réduisant significativement la perte réelle. L’indemnisation finale de 45 000 euros, inférieure de 30% à la demande initiale, souligne l’importance d’une évaluation objective des préjudices.
La Cour d’appel de Lyon a établi en 2021 une jurisprudence importante concernant les entrepreneurs en phase de développement. Dans cette affaire, un créateur d’entreprise en activité depuis 18 mois seulement a obtenu une indemnisation basée sur ses projections d’activité validées par son expert-comptable et confirmées par des commandes fermes. Cette décision ouvre la voie à une protection efficace des jeunes entreprises, traditionnellement pénalisées par l’absence d’historique d’exploitation.